L’entreprise et les Sustainable Development Goals (SDGs)
8 mars 2016
725 mots – Temps de lecture : environ 2 minutes
Rapport publié en 2015 conjointement par le réseau “Business Fights Poverty” et la Harvard Kennedy School.
Mots clés : SDG, sustainable development
Review
Pour la première fois dans la série de résumés de livres que j’ai entamée il y plusieurs années, je n’ai pas choisi un livre mais un rapport.
Ayant suivi depuis quelques temps le réseau “Business Fights Poverty” (leur groupe Linked-In est une mine d’informations), j’étais impatient de découvrir ce rapport. Son style n’est pas vraiment vivant, comme souvent dans le cas de rapports représentant les vues de plusieurs personnes, mais il contient un certain nombre d’informations intéressantes dans un format assez court (56 pages) et j’ai donc décidé de le partager avec vous.
Les “Sustainable Development Goals” (Objectifs de Développement Durable ou ODD en français) ont été fixés par les Nations Unies pour la période 2015-2030, et viennent remplacer les Millenium Development Goals (MDGs). L’objectif de lutter contre la pauvreté sous ses multiples formes y occupe toujours la plus grande place, mais la dimension environnementale, jusque là assez négligée, est maintenant beaucoup plus présente. Une autre différence qui a émergé au cours de l’élaboration de ces 18 SDG est la vision de l’entreprise: le rôle que le monde des affaires peut jouer pour atteindre ces objectifs est désormais pleinement reconnu. Une des questions essentielles est devenue: “Comment activer le potentiel de transformation du secteur privé?”.
ALLER PLUS LOIN QUE LES PROGRAMMES DE RSE POUR UN IMPACT D’AMPLEUR
Pour que l’action des entreprises ait un impact sur la pauvreté à l’échelle aujourd’hui nécessaire, il faut aller beaucoup plus loin que les programmes de RSE: ce sont désormais les business models qui doivent être repensés et ajustés.
Ce rapport apporte ici deux contributions: il donne des éclairages sur 6 conditions nécessaires (“building blocks”), qui doivent être mises en place, comme les pièces d’un puzzle, pour atteindre un tel impact, et il propose 14 études de cas d’entreprises qui ont commencé à s’engager dans cette direction.
6 CONDITIONS NECESSAIRES
Ces 6 pièces du puzzle identifiées par les auteurs sont :
– Une prise de conscience la plus large possible au sein de l’entreprise, du rôle qu’elle peut jouer pour se rapprocher des SDG, et pas seulement au sein du département RSE ou parmi les dirigeants.
– Un “business case” indiquant clairement les implications économiques et ce que l’entreprise peut légitimement attendre de ses efforts.
– Une capacité de mise en application des décisions prises, ce qui suppose notamment de s’assurer que les collaborateurs ont les compétences nécessaires et de mettre en place des incitations.
– Des données du marché doivent être recherchées pour guider les actions.
– Des codes de conduite et des standards doivent être développés, adaptés et continuellement améliorés.
– Un soutien réglementaire doit être mis en place (il s’agit avant tout de la responsabilité des autorités publiques, mais les auteurs plaident ici pour des partenariats étroits entre public et privé).
Pour chacune de ces 6 pièces du puzzle sont présentés des exemples et des recommandations concrètes.
DES PARTENARIATS APPROFONDIS ET AMBITIEUX
L’importance de partenariats étroits impliquant entreprises, ONG et/ou secteur public ressort nettement des cas présentés dans la dernière partie du rapport – essentiellement des sociétés anglaises et américaines, dans une variété de secteurs, décrits en 2 pages chacun. L’action d’Abbott en Haiti pour lutter contre la malnutrition, par exemple, est conçue en coopération étroite avec l’ONG Partners in Health. Autre exemple: l’action de SABMiller pour le problème de l’accès à l’eau en Afrique du Sud s’inscrit dans le Strategic Water Partners Network (SWPN), une initiative regroupant entreprises, ONG et institutions publiques (les autres cas décrits dans le rapport sont GSK, Pearson, Standard Chartered, AbbVie, Citi, Coca-Cola, CDC, Diageo, De Beers, Anglo American et Chevron).
Il serait tentant de dénigrer ces initiatives comme trop limitées ou timides au regard de la taille des entreprises en question, mais il semble juste de ne pas exiger des entreprises ce que l’on accepte volontiers pour les individus engagés sur un chemin de transformation vers plus de sens et d’engagement: cela prend du temps, et toute avancée doit être encouragée.
Il est en particulier réjouissant de constater à la lecture de ces cas qu’une grande majorité des entreprises concernées se sont attelées à repenser en partie leur business model, c’est-à-dire leur moteur économique. C’est précisément ce que de nombreux critiques de la RSE conventionnelle demandent depuis des années!
Au final, même s’il est évident qu’il reste un chantier immense, ce rapport offre des signaux positifs qui méritent d’être répliqués et amplifiés.